Les accords dans le groupe nominal

I. Qu’est-ce qu’un groupe nominal?

Un groupe nominal est constitué d’un ou plusieurs mots regroupés autour d’un nom. Il peut être composé, en plus du nom, d’un déterminant, d’adjectifs, de compléments du nom ou de propositions subordonnées relatives. Les adjectifs occupent une fonction d’épithète (liée ou détachée) du nom qu’ils qualifient.

II. L’accord entre le déterminant et le nom

Le nom s’accorde en genre et en nombre avec le déterminant qui le précède.

masculin singulier: le boulanger
féminin singulier: la boulangère
masculin pluriel: les boulangers
féminin pluriel: les boulangères

On distingue plusieurs catégories de déterminants:

  • les articles définis: le, la, les.
  • Les articles indéfinis: un, une, des.
  • Les déterminants possessifs: mon, ma, mes, ton, ta, tes, son, sa, ses, notre, nos, votre, vos, leur, leurs.
  • Les déterminants démonstratifs: ce, cet, cette, ces.
  • Les déterminants numéraux cardinaux: un, deux, trois, vingt, cent, mille…
  • Les déterminants numéraux ordinaux: premier, second, deuxième, vingtième, dernier…
  • Les déterminants interrogatifs et exclamatifs: quel, quelle, quels, quelles.
  • Les déterminants indéfinis: aucun(e), autre(s), certain(e)(s), chaque, différent(e)s, divers(es), maint(e)s, même(s), nul(le), plusieurs, quelconque(s), quelque(s), tel(le)(s), tout(e)(s), tous.

Le déterminant «chaque» est singulier, même si par son sens, il semble désigner plusieurs choses.

«Je me rappelle, au lycée, j’écrivais mon nom à la craie sur le tableau, et puis j’effaçais chaque lettre une à une, et il ne restait que le noir.» (Mauriac, Les Mal-Aimés)

Le nom est parfois séparé de son déterminant par un ou plusieurs mots (adjectifs, adverbes).

«je mettrais en relief le côté aristocratique de votre oncle qui en somme fait un effet bœuf et, la première rigolade passée, frappe par un très grand style.» (Proust, À l’ombre des jeunes filles en fleurs)

Parfois, un nom peut être utilisé sans déterminant. C’est parfois le cas lorsque le nom est précédé d’une préposition.

«Il ne sait pas que Ricky l’a écouté, sans intention précise – simplement son habitude de décrypter chaque son ou chaque silence.» (Calvez, Celui qui venait du froid)

«Ma fille nous donne cent francs par mois, et elle va en voiture, et elle mange dans de l’argent, elle est miyonaire!» (Balzac, La Cousine Bette)

Ce cas peut également se présenter lorsque l’auteur utilise une apostrophe.

«Salut! bois couronnés d’un reste de verdure!» (Lamartine, Méditations poétiques, «L’automne»)

Certains noms propres sont précédés d’un déterminant, notamment les pays, les fleuves, les chaines de montagne.

«Sous le pont Mirabeau coule la Seine» (Apollinaire, Alcools, «Le pont Mirabeau»)

«Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE» (Aragon, Le Roman inachevé, «Strophes pour se souvenir»)

D’autres noms propres ne sont généralement pas précédés d’un déterminant, comme les noms de famille ou les noms de ville. Il existe toutefois des exceptions.

«C’est un magnifique et charmant spectacle que Paris, et le Paris d’alors surtout, vu du haut des tours Notre-Dame aux fraîches lueurs d’une aube d’été.» (Hugo, Notre-Dame de Paris)

Lorsque l’on veut désigner une famille, il est possible d’utiliser l’article défini «les», mais le nom reste invariable, à l’exception des familles illustres.

«La première des deux demeures, en venant de la station d’eaux de Rolleport, était occupée par les Tuvache, qui avaient trois filles et un garçon ; l’autre masure abritait les Vallin, qui avaient une fille et trois garçons.» (Maupassant, Contes de la Bécasse, «Aux champs»)

«Les éclats bourboniens de la musique militaire étaient étouffés sous les hourras de: Vive le duc d’Angoulême! vive le roi! vivent les Bourbons!» (Balzac, Le Lys dans la vallée)

III. L’accord entre l’adjectif épithète et le nom

L’adjectif s’accorde en genre et en nombre avec le nom qu’il qualifie. On inclut également les participes passés employés comme adjectifs.

Lorsque l’adjectif suit ou précède le nom qu’il qualifie, on parlera d’épithète liée.

«Une terreur insurmontable s’empara de moi, mes cheveux se hérissèrent sur mon front, mes dents s’entre-choquèrent à se briser, une sueur froide inonda tout mon corps.» (Gautier, Contes humoristiques, «La cafetière»)

L’adjectif peut parfois être précédé d’un adverbe.

«Peut-on se figurer de mariage plus doux? d’union plus délicieuse?» (Marivaux, Le Jeu de l’amour et du hasard)

Lorsque l’adjectif est séparé du nom qu’il qualifie par une virgule, on parlera d’épithète détachée. L’adjectif étant parfois éloigné du nom, il est indispensable de se poser la question de l’accord.

«Cette forme humaine qui lui avait été si proche, percée maintenant de coups d’épieu, brûlée par un mal surhumain, tordue par tous les vents haineux du ciel, s’immergeait à ses yeux dans les eaux de la peste et il ne pouvait rien contre ce naufrage.» (Camus, La Peste)

Il existe des règles particulières pour les adjectifs de couleur. Ceux qui sont composés (gris anthracite, bleu ciel, jaune-orangé…) ou proviennent d’un nom (marron, orange, taupe, citron…) restent invariables, à l’exception de rose, fauve, mauve, pourpre, incarnat, écarlate, châtain, violet, vermeille. Les adjectifs empruntés à des langues étrangères restent invariables (des cheveux auburn, des pantalons kaki…). Lorsqu’un objet est de plusieurs couleurs, on n’accorde pas les adjectifs (ex: des cravates vert et blanc sous-entend que les cravates sont bicolores; des cravates vertes et blanches signifie que certaines cravates sont vertes et d’autres sont blanches).

«C’était le jeudi saint, quand les cloches sonnent, avant qu’elles partent pour Rome, et qu’on fait cuire les œufs rouges» (Claudel, Violaine)

«Sous les vitrines étincelaient […] des saphirs bleu clair et bleu foncé, tels que le corindon, et aussi recherchés que celui du Malabar ou du Tibet» (Verne, Les Enfants du capitaine Grant)

«Puis, les passants s’en allèrent, vexés, croyant à une farce, lorsqu’ils les virent brusquement, très bons amis, s’émerveiller ensemble, au sujet d’une nourrice vêtue de clair, avec de longs rubans cerise.» (Zola, L’Œuvre)

«Elles sont tantôt grises et tantôt mauves, tes prunelles. Une couleur trouble, pas franche.» (Martin du Gard, Les Thibault)

«Je vois encore le linge qui séchait sur toute la longueur du capot… Toutes les couleurs les plus vivaces… des framboise, des safran, des verts, des orange. Y en avait pour tous les goûts…» (Céline, Mort à crédit)