Pommerat, Cendrillon – Deuxième partie, scènes 14 et 15

Scène 14

 

La voix de la narratrice. Alors voilà l’histoire se termine. C’est la fin. Comme je vous l’ai dit pour commencer, je ne me rappelle plus si cette histoire est la mienne ou bien l’histoire de quelqu’un d’autre. Mais ça n’a pas d’importance. Aujourd’hui, ma mémoire est fatiguée, c’est comme si mon corps et ma voix n’habitaient plus au même endroit. Ma vie a été longue, très longue et très heureuse, alors je suis comblée. J’ai beaucoup aimé, j’ai eu quelques enfants et j’ai vécu plein d’événements, impossibles à raconter. Mais je sais… il y a encore un détail concernant la très jeune fille que vous aimeriez savoir. Alors ce détail je vais vous le dire. La très jeune fille, qui était curieuse et courageuse, demanda un jour à la fée devenue son amie de pouvoir réentendre les mots de sa mère prononcés avant de mourir. Ainsi la fée, qui avait ce pouvoir, lui permit de revenir sur le passé. Et voilà ce qu’elle a pu entendre.

Chambre de la mère mourante comme au début de l’histoire.

La très jeune fille accompagnée de la fée revoit la scène des derniers instants passés avec sa mère. Comme devant une projection.

La mère. Ma chérie… Si tu es malheureuse, pour te donner du courage, pense à moi… Mais n’oublie jamais, si tu penses à moi fais-le toujours avec le sourire.

La voix de la narratrice. Bien sûr ça la rendit triste de revoir ainsi sa mère. Et de réaliser à quel point elle l’avait mal comprise. Mais à partir de ce jour, quand elle pensait à elle, c’était de la force qu’elle ressentait.

Scène 15

Plus tard. Une nuit de fête. Musique.

Le très jeune prince et la très jeune fille dansent, se déchaînent.

La voix de la narratrice. Et ces moments-là non plus elle ne les oublia jamais. Même après que la vie les a éloignés l’un de l’autre, le très jeune prince et la très jeune fille s’écrivirent. Ils s’envoyèrent des mots même de l’autre bout du monde, et ça jusqu’à la fin de leur existence. Voilà c’est fini. Même les erreurs ont une fin heureusement. Alors moi, je me tais et je m’en vais.